Pour organiser les élections, voici une méthode à la fois originale, très efficace et qui prend tous son sens en terme d'inclusion. L'idée est de confier l'organisation des élections à une classe constituée d'élèves primo-arrivants, jeunes qui sont donc en phase d'apprentissage du français et qui sont en Belgique depuis peu de temps. Là où ces jeunes sont en général plutôt mal accueillis dans notre pays, où ils sont souvent à l'écart des autres élèves et où ils ont peu de connaissance des grands principes de notre société, l'idée est donc de renverser la situation en les mettant au premier rang des rôles citoyens à jouer.
L'idée de cette méthode est donc de prendre une classe qui est en général isolée des autres et de profiter des élections pour la mettre en avant à travers cette fondamentale tâche de "vivre ensemble" qu'est l'organisation des élections. Cela a beaucoup de sens si l'école dispose d'une section "DASPA" (Dispositif d'Apprentissage spécifique pour Primo-Arrivants"). Mais c'est aussi indiqué avec des classes de 1ère ou de 2e différenciée. On peut même imaginer cette stratégie de manière plus globale, en impliquant par exemple chaque année une classe différente dans ce rôle d'organisatrice des élections. Quelle que soit la situation de l'école, il est important que l'un ou plusieurs des enseignants de cette classe soient prêts à prendre du temps dans leurs cours pour mettre le dispositif en place.
Cette manière de lutter contre l'isolement des DASPA est d'autant plus importante que, souvent, ils sont "de facto" exclus des votes. Ces élèves ne parlant pas très bien le français, il est en effet régulier qu'ils ne puissent pas directement jouer le rôle de délégué, ou que le vote n'ait pas de sens pour eux puisque seul un ou deux élèves de la classe ont les compétences pour effectivement le jouer. Lorsque c'est le cas, l'organisation de ces élections leur permet, malgré cette différence, d'être impliqués dans le moment collectif que constituent les élections des délégués élèves.
L'organisation des élections d'une école n'est pas une tâche compliquée. En quelques heures de cours (ou en une ou deux semaines pour les DASPA), il est tout à fait possible d'assimiler les concepts et les rôles nécessaires. Mais cette accessibilité n'enlève rien à l'importance de la tâche, et donc la valorisation de ceux qui vont la mener à bien. Confier les rôles de "président de bureau de vote", d'"assesseurs", d'"hôtes" pour accueillir les votant, c'est dès lors valoriser sensiblement ces élèves qui, en général, sont à la fois en retrait de l'école et en difficulté au niveau de la confiance en soi.
En Belgique comme ailleurs, nous avons un réel souci en terme d'accueil des migrants. Par cette stratégie, il est possible d'inviter à la fois subtilement et intelligemment à une autre perception de ces citoyens fraichement arrivés. Lorsque l'on propose le projet aux élèves concernés, ils ne s'y trompent d'ailleurs pas et l'accueillent presque toujours avec enthousiasme et/ou curiosité. Et, lorsque ces élèves venus d'ailleurs se mettent à accueillir l'ensemble des autres élèves de l'école, le résultat peut vraiment être de l'ordre de la magie. Derrière l'accueil, il y a d'ailleurs aussi un bénéfice en terme de rencontre et de connaissance mutuelle. Après avoir reçu tous les autres élèves de l'école dans leur local, les élèves organisateurs sont beaucoup moins des étrangers à l'établissement concerné.
Autre avantage de la démarche : montrer de manière consistante à quel point ces élections sont importantes. Pour la classe organisatrice, le fait de prendre le temps d'organiser les élections est clairement un signe de leur importance et une belle opportunité pour faire plonger ces élèves dans les principes qui sont liés à ce moment démocratique si particulier. Pour tous les autres élèves, voir l'implication de la classe accueillante est également une manifestation de l'importance de l'événement.
En mettant ainsi les élèves aux premiers rangs de l'élection, le dernier avantage est de bien montrer que c'est "leur" élection. Contrairement à beaucoup d'élections qui sont faites à la "va-vite", en classe et pilotée par l'enseignant titulaire, ici ce sont les élèves qui occupent les premières lignes. Ce sont eux qui expliquent à leur pairs comment cela va se passer, qui sont garants de l'intégrité du vote, qui au final s'approprient complètement la démarche.